LBO : une stratégie hautement technique pour céder une PME

Introduction

La cession d’une PME représente un moment stratégique, tant pour le cédant, soucieux de valoriser son patrimoine professionnel, que pour le repreneur, désireux de renforcer et développer l’activité. Au-delà du transfert de titres, l’opération doit garantir la continuité économique, la préservation de l’emploi et la sécurisation des intérêts des partenaires financiers.

Dans ce contexte, le LBO (leveraged buy out), via une holding dédiée, combine fonds propres limités et endettement maîtrisé, permettant la reprise et le financement de la cible exclusivement par ses propres flux.

I – Les conditions de mise en œuvre du LBO

A – Le profil de la société cible

Le succès d’un LBO repose sur une cible à même de générer suffisamment de trésorerie pour absorber la dette additionnelle. Les critères clés sont :

  • Solidité financière : rentabilité significative, endettement maîtrisé, faible consommation de capitaux (BFR, investissements) ;

  • Visibilité robuste des flux de trésorerie futurs (cash‑flows récurrents, prévisibles) ;

  • Management expérimenté et stable ;

  • Position concurrentielle forte, savoir‑faire transmissible ne reposant pas sur un « homme‑clé » unique.

Cette rigueur permet de sécuriser les remontées de dividendes ou de management fees depuis la cible vers la holding pour le service de la dette.

B – L’effet de levier : financier, fiscal, juridique (et social)

Le LBO s’appuie sur des effets de levier complémentaires :

  1. Financier : forte utilisation de l’endettement au niveau de la holding, remboursable via les flux de la cible, pour accroître la rentabilité des fonds propres.

  2. Fiscal : les intérêts d’emprunt sont généralement déductibles du résultat imposable de la holding, diminuant ainsi l’impôt à payer et accroissant la capacité de remboursement. De plus, la combinaison du régime mère‑fille (dividendes quasi‑exonérés, quote‑part de frais et charges réduite à 1 % en cas d’intégration fiscale) est particulièrement efficace. Attention : ces déductions peuvent être restreintes par l’amendement Charasse, les règles de sous‑capitalisation ou l’article 209‑IX du CGI, qui limite la déductibilité si la société ne démontre pas un pouvoir de décision autonome sur la cible ; toutefois, la Cour de cassation a précisé que le LBO en lui‑même n’est pas fautif, dès lors que la structure n’est pas abusive.

  3. Juridique : la création de la holding permet de centraliser le contrôle de la cible pour un apport limité, tout en organisant la structure du groupe.

  4. Social : par le biais de management packages (actions gratuites, stock‑options, BSCPE, actions de préférence…), les managers ou cadres de la cible peuvent être associés au succès, favorisant l’alignement des intérêts. Depuis le 15 février 2025, ces plus‑values sont désormais partiellement taxées comme des salaires, sauf si le gain du salarié reste dans un certain ratio (jusqu’à trois fois la performance de l’entreprise), auquel cas la plus‑value peut encore relever de l’imposition mobilière.

II – Formalités pratiques et structuration du montage

A – Formes courantes de LBO

Les configurations de LBO varient selon les profils des repreneurs :

  • LMBO (Leveraged Management Buy‑Out) : reprise par des cadres dirigeants internes.

  • LBI (Leveraged Buy‑In) : intervention d’un investisseur externe.

  • BIMBO (Buy In Management Buy‑Out) : combinaison d’investisseurs externes et de managers internes.

  • LBU (Leveraged Build‑Up) : constitution d’un pôle d’activités via acquisitions complémentaires.

  • OBO (Owner Buy‑Out) : le cédant reste actionnaire via la holding pour financer sa propre cession.

B – Financement de l’opération : architecture de la dette

Le montage financier LBO se structure ainsi :

  • Création d’une holding de reprise (capital restreint, apports ≈ 25 % de la valeur cible) ;

  • Recours à divers instruments d’endettement :

    • Dette senior : bancaire, amortissable sur 5 à 9 ans ;

    • Dette mezzanine : obligataire ou bons de souscription, mixant dette et quasi‑fonds propres ;

    • Dette bullet (subordonnée) : remboursée en une seule échéance à moyen‑long terme (7–10 ans).

La cible génère des flux (dividendes, management fees), remontés à la holding pour assurer service de la dette. Ce montage comporte toutefois des risques : conjonctureal, retour de trésorerie insuffisant, pression sur les marges… autant de facteurs pouvant fragiliser la structure.

III – Un atout stratégique maîtrisé pour les entreprises

Le LBO représente un outil structuré et puissant pour la transmission optimisée de PME, combinant technique financière, structuration juridique et optimisation fiscale. Il permet de valoriser l’entreprise tout en assurant la continuité économique et la pérennité de l’emploi, à condition d’être rigoureusement structuré avec l’appui d’experts.

Conclusion

Le LBO s’affirme comme un instrument de transmission particulièrement efficace, à condition de réunir les conditions adéquates : une entreprise cible solide, disposant de perspectives de trésorerie fiables et d’un management stable ; une structuration financière équilibrée, alliant dettes senior, mezzanine et bullet ; enfin, une mobilisation raisonnée des différents effets de levier – financier, fiscal, juridique et social – permettant de maximiser la valeur créée.

Toutefois, la réussite d’un tel montage ne saurait reposer uniquement sur la mécanique financière. Elle exige une anticipation juridique et fiscale rigoureuse, une analyse stratégique approfondie, ainsi qu’un accompagnement sur mesure pour sécuriser chaque étape de l’opération.

En ce sens, le cabinet Keysington se positionne comme un partenaire privilégié des dirigeants d’entreprise afin de transformer une opération complexe en une stratégie de transmission maîtrisée et créatrice de valeur.

Cabinet KEYSINGTON

Précédent
Précédent

Transmission d’entreprise familiale : la pertinence du Family Buy Out (FBO) dans le cadre du droit patrimonial et fiscal français

Suivant
Suivant

Cession d’entreprise et obligation d’information des salariés : une exigence aux contours précis.